De nouveau dans l'ombre

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Arthan avait laissé Palina hors du pays cette fois ci. Etant bien trop différente des chevaux du pays, elle serait bien trop reconnaissable. Il avait laissé presque tout ce qu'il possédait sur son dos. Il n'avait pris que ses armes, son armure et avait enfilé sa cape et sa capuche. Il devait ne surtout pas refaire les mêmes erreurs que précédement. Cette fois ci, il risquait très gros si il se faisait atrapper. D'autant plus qu'il n'agissait plus pour aucun gouvernement désormais. Il n'avait trouvé aucun garde sur son chemin vers la cité.

Marchant vouté et visage baissé pour ne pas qu'on le reconnaisse à sa stature plus haute et son teint moins pale que le peuple dans lequel il tentait de se fondre. Il passait les gardes sans grande difficultés dans les rues agitées de la cité d'ébène lorsque soudain il reconnu les deux sergents qui l'avaient reconduit dehors. Pressant l'allure, il entra dans le premier batiment qui s'offrait à lui. La taverne du barde inspiré. A l'interieur, personne ne fit attention à son entrée hormis le tavernier. Les clients étaient bien trop occuppés à se saouler, crier, jouer de l'argent, les trois en même temps pour la plupart. Arthan s'assit dans le coin le plus ombragé de la pièce, sans se découvrir. La capuche lui masquait le visage. Quelques instants après, le tavernier vint lui proposer quelque chose à boire. Il essuyait un pichet avec son tablier crasseux :

" Hé dis moi l'ami, qu'est ce que je te sers pour te faire oublier ta triste journée ? "

Sans relever la tête, Arthan se rendit compte qu'il ne connaissait rien des boissons locales. Il demanda simplement une cervoise.

" Et une cervoise noire ! Ca arrive tout de suite. "

Arthan regardait autour de lui. Il n'y vit pour la plupart des tables que des saoulards qui en redemandaient. Il approcha discrètement sa table de la table voisine. Et se pencha près de l'homme qui se trouvait là :

" Dis moi mon brave, je viens de la campagne et je ne sais pas où se trouve la bibliothèque ici. Peux tu me l'indiquer ? "

La réponse de l'homme fut d'abbord un rot bruyant et long. Puis tentant de remettre la question en ordre dans sa tête, il hésita longtemps fixant le sol avec des "heu" et des "ben". Puis d'un seul coup, il regarda Arthan comme s'il avait enfin compris le sens de la vie et dit :

" Hé ! Mais je te reconnais toi ! "

A ces mots Arthan eut un mouvement de recul, sans savoir quoi dire ou quoi faire.

" Ouais ! J'te connais très bien même ! T'es mon pote heuheu ... "

Arthan se détendit alors, réitérant sa question.

" Ouais ouais, comme t'es un ami, je vais te dire où est la salle des bouquins, mais chut hein ... C'est un secret que je dis qu'a mes meilleurs amis comme toi "

S'approchant de l'oreille d'Arthan, son halleine empestait l'alcool. Il dit alors :

" C'est dans le chateau de la jolie reine Ceit, mais attention ! C'est plein de types en robes qui surveillent les gens depuis les fenetres. Hips ! Moi une fois ils m'ont regardé avec un sale oeil et depuis je vais plus par là ... C'est dans l'aile ouest ! ... Heu non Est ! ... Attends voir ... Nan c'est bien l'aile Ouest ouais j'en suis sur ! héhéhé "

S'en tenir aux dires d'un homme saoul c'était faible, mais c'était la seule personne à qui Arthan pouvait s'adresser sans qu'il le soupçonne. Se levant alors, il se dirigea vers la porte de derrière puis sortit, laissant le poivrot derrière qui lui hurlait de revenir bientot.
Laissant l'ambiance toute particulière de la taverne du barde insiré, il se trouvait désormais dans une ruelle légèrement éclairée. Il voyait le l'imposant chateau qui domainait la capitale se détachant des toits des habitations et commerces. Il partit alors dans cette direction.

Suivant les ordres de Fordrev, un régiment de cavaliers aux armures aussi sombres que l’ébène s’était lancé depuis le château. Les montures des cinq hommes martelaient le sol avec fracas, et de nombreuses personnes se retournaient avec crainte sur leur passage et leur attitude farouche. En effet, l’échec était très mal toléré dans la nation de feu Balthus… Et l’armée des Ombres n’était pas réputée pour faire de la dentelle.

Les premiers hommes s’arrêtèrent dans les habitations environnant le château de la reine, rentrant dans les maisons, les lieux publics, et interrogeant les passants.

Le chateau ... Ce lieu qui avait été si acceuillant et si froid à la fois. L'idée d'y retourner n'était pas pour plaire à Arthan, seulement il fallait y aller. Peut être que le pays de l'ombre, le second spectateur des évènements de cette guerre en saurait plus long sur ce qui était arrivé au héros des plaines. Probablement que les chroniques du pays devaient en parler de ce qui s'était réellement passé. Et avec un peu de chance, ces chroniques se trouvaient dans la bibliothèque à l'endroit même que lui avait indiqué ce client de taverne ... En réalité ça faisait beaucoup de suppositions, mais Arthan n'en avait cure. Il ne préférait pas y penser sachant que la moindre hésitation pouvait lui être fatale.

Il continuait sa marche dans les ruelles de la ville, empruntant les passages les moins fréquentés, tentant d'arriver à l'aile ouest du chateau. Soudain, alors qu'il s'approchait de son but, il vit deux cavalier passer au galop et un troisième s'arreter au bout de la ruelle dans laquelle il se trouvait, interrogeant un roturier qui se trouvait là. Arthan plaqua instinctivement dans un sorte d'alcove qui se trouvait sur sa gauche, attendant que le cavalier s'en aille. Pour lui ça ne faisait aucun doute. Ils savaient qu'il était là. Il lui fallait redoubler de vigilance.

Il continua plus prudement que jamais, rasant les murs, marchant prestement. Tant et si bien que l'entrée de l'aile ouest du chateau s'offrait désormais à lui. Il n'y avait plus qu'une place assez fréquentée à traverser, cependant de nombreux gardes s'y trouvaient en faction ...

[EDIT : j'ai ajouté le dernier paragraphe]

Ayant fait le tour de la ville sans trace apparente de l'étranger, un grand nombre de cavaliers se regroupa devant l'entrée de l'aile ouest du château, avec les soldats postés en faction. En effet, les hommes d'armes censés surveiller l'entrée s'étaient regroupés un instant autour des autres.

Le sergent descendit de sa monture, et déclara d'une voix forte :

« Nulle trace de l'étranger ? »

Le silence fit écho à sa question tandis que certains baissaient la tête, penauds.

« Sa Majesté la reine exige que l'espion des Plaines soit rattrapé ! Je ferai donner le fouet à chacun s'il ne croupit pas dans les cachots d'ici l'aube ! »

Chaque soldat des Ombres acquiesca lentement aux paroles menaçantes de l'officier, leur attention entièrement captivée à celui qui semblait tenir ses ordres de Ceit elle-même. Certains en oubliaient même de surveiller l'entrée...

Enfer ! Les cavaliers se tenaient justement en faction devant la porte de l’aile ouest. Celle là même où se trouvait la bibliothèque royale. Simple coïncidence ou bien avaient ils été mis au courant de quelque manière que ce soit des projets d’Arthan ? Rien n’était moins sur. Restant tapis dans les ténèbres réconfortantes de la ruelle étroite dans laquelle il se trouvait, Arthan tendit l’oreille en direction de la place marchande. Une voix semblait couvrir tout ce brouhaha : celle du sergent chef de l’escouade de cavaliers. Selon lui les ordres venaient de la reine Ceit. Pour Arthan il était clair que cette dernière n’était pas la mieux placée dans le rôle de la fanatique xénophobe à l’origine de cette chasse à la sorcière. Les ordres devaient probablement venir de ses subordonnés.

Peu importait de qui venaient les ordres. Ce qui comptait c’était d’arriver derrière ces cavaliers. Arthan observa avec attention la scène qui se déroulait sous ses yeux. Il vit la faille du coté des soldats. Ceux-ci s’occupaient bien plus des réprimandes de leur supérieur que de la foule où pourrait se cacher un probable étranger. Arthan avait assez analysé la situation pour se lancer dans la place. Avançant le plus discrètement parmi la populace de l’ombre, il laissait toujours au moins un passant entre lui et les cavaliers. Sans se faire remarquer, il arriva finalement à quelques mètres a droite du petit régiment. Mais le plus dur restait à faire. Il lui fallait désormais passer derrière eux afin d’atteindre la porte qu’ils gardaient. Un plan se dessina dans sa tête. Il lui fallait une diversion. Regardant avec attention autour de lui, il vit un pavé du dallage de la place qui était légèrement fêlé. Il sortit alors sa dague et s’empressa d’en détacher le morceau qui semblait le plus simple à retirer. Visant le flanc du cheval le plus proche, il espérait que celui-ci s’emballerait. Seulement en voyant la trajectoire de son caillou, Arthan se souvint avec déception que viser n’avais jamais été son fort … Le caillou vola au dessus des gardes et atterrit sur l’étal du marchant d’amphores qui se trouvait derrière, cassant au passage une bonne partie des pièces de l’artisan. Arthan était en train de se dire que ce n’était pas du tout son jour de chance lorsqu’il vit que le potier se dirigea vers l’étal voisin, celui du tanneur.

« Hé ! C’est toi qui viens de détruire mes amphores ?! Tu as toujours été jaloux parce que j’avais plus de clients que toi mais cette fois tu as été trop loin !»

A ces mots, le marchand d’amphores prit un bâton qui se trouvait là et commença à saccager l’étal devant le tanneur. Ce dernier ne tarda pas à en venir aux mains lui aussi et une bagarre se déclencha juste sous le nez des cavaliers. Peut être que finalement la chance souriait bien à Arthan …

Alors que chacun des gardes présents acquiesçaient promptement aux ordres du sergent, un violent bruit de fracas de verre brisé retentit depuis l’étalage d’un marchand d’amphores situé derrière le sergent. Ce dernier vit volte-face.

« Hé ! C’est toi qui viens de détruire mes amphores ?! Tu as toujours été jaloux parce que j’avais plus de clients que toi mais cette fois tu as été trop loin ! »

Le potier dont les créations étaient presque toutes détruites s’était dirigé prestement vers l’étalage le plus proche, celui d’un tanneur, avant d’en mettre à sac la devanture. Son concurrent, visiblement abasourdi et incompréhensif de la situation, disparut à l’intérieur de sa boutique, puis en ressorti armé d’une lame grossière.

« Mais il est complètement fou ! » dit-il en tentant d’empêcher le potier enragé de saccager sa boutique.

« Halte ! Arrêtez ! » cria le sergent visiblement agacé. Mais comme rien n’y faisait, il fit signe à deux hommes d’arme proches qui maîtrisèrent le marchand d’amphores. Après un bref interrogatoire et un rapide exposé de la situation, l’officier fatigué se massa les paupières avant de déclarer :

« Emmenez-le. »

« Mais, attendez ! Non ! » protestait furieusement le potier en se débattant. Il reçut, pour toute réponse, un violent coup dans la mâchoire qui le jeta à terre. Le sergent attarda un instant son regard sur l’infortuné marchand, avant de reporter son attention sur les soldats en faction.

« Alors, bande d’incapables, ne restez pas plantés là à ne rien faire ! Au travail ! »

Ils ne se le firent pas demander une seconde fois.

[Edit] : Fautes d'orthographe.

Arthan avait misérablement manqué sa cible, mais l'objectif était atteint. Pendant que les yeux des cavaliers et du sergent étaient fixés sur la scène de vive dispute entre les deux marchands, Arthan sortit de sa cachette et se faufila derrière les hommes armés, agissant le plus naturellement du monde comme s'il en avait l'autorisation.

Ayant passé les escaliers et le parvis du chateau, il ne put se sentir coupable de ce qui arrivait à ce pauvre bougre de potier. Il se retourna brièvement, regardant les gardes l'emmenner, ne pouvant réprimer un sentiment de culpabilité. Pertes acceptables ou moyens laches et égoïstes d'arriver à ses fins ? Il stoppa net ses remords entrant finalement dans le chateau. Il entendait vaguement résonner la voix du sergent et ne parvint à en distinguer le sens, mais le ton employé ne laissait pas de doutes possibles.

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